La crise du Covid-19 et plus particulièrement les trois confinements français ont profondément marqué les habitudes littéraires des français.

Dans cet article, nous ferons le point sur la situation en 2021 pour les différents acteurs de la chaine du livre, puis l’équipe d’Anovi se prêtera à l’exercice des prévisions d’avenir.

Du côté des auteurs :

• Jamais autant d’auteurs n’ont pris la plume.
• Jamais autant de livres n’auront été achevés et proposés aux maisons d’édition. Gallimard a par exemple concédé recevoir 1500 manuscrits par mois, soit deux fois plus qu'en temps normal. 

Du côté des lecteurs :

• De nouvelles habitudes ont été prises, avec le livre numérique, le livre audio, la commande par internet ou en click & collect.
• De nouveaux genres littéraires ont été découverts par les lecteurs (médecines douces, finances personnelles ...), et le livre s’est ouvert à des catégories de populations qui lisaient moins auparavant. Par exemple, en 2020, le livre numérique a été adopté par 274 000 lecteurs de moins de 40 ans qui n'avaient jusqu'à présent jamais lu en e-book. 
• Le polar et la romance, pour la fiction, et les guides de développement personnel, pour la non-fiction, sont les genres dont la croissance a été la plus forte ces derniers mois.

Du côté des éditeurs :

• 72% des maisons d’édition sondées par le SNE ont pris des mesures d’activité partielle.
• 18% des nouveautés ont été reportées en moyenne.
• Toutes les maisons se sont dites surprises par l’afflux de manuscrits, et la surcharge de travail des comités de lecture, ce qui n’est pas forcément signe de prospérité pour ces éditeurs indépendants. Plus de manuscrits, c'est plus de difficulté à se concentrer sur quelques titres dans lesquels l'éditeur croit, et plus de travail pour sélectionner, donc moins de temps passé en promotion.
• Les parutions de livres « plus risqués » ont été les premières à être décalées.
  
• L'impression à la demande se généralise et les imprimeurs sont saturés de petites demandes, ce qui entraine des annulations de commandes.
  

Du côté des libraires :

• Des baisses de chiffres d’affaires importantes, liées aux fermetures
• L’observation d’habitudes de consommation qui changent, avec l’achat par internet et par mobile, la baisse de fréquentation.
• La hausse des achats de livres d’occasion sur les sites dédiés

La Covid-19 a réconcilié les français avec l’écriture et la lecture.

Oui, Netflix et YouTube ont eu des trafics en croissance, mais le livre n’est pas en reste. Les français ont lu en moyenne 2,5 livres pendant le premier confinement, nettement plus que d’habitude, et la tendance s'est poursuivie toute l'année.

Pour les lecteurs comme les auteurs, le livre est une valeur refuge en période difficile.

Sur les fondements de transformation apportés par la crise sanitaire, voici quelques perspectives d'évolution de notre univers littéraire :

La digitalisation

Comme beaucoup de secteurs de l'économie, la digitalisation s'est accrue et ne fera par marche arrière.

La vente en ligne a pris des parts de marchés inévitables. Les salons du livres, les rencontres avec les lecteurs se feront de plus en plus en ligne, par Zoom ou Facebook Live.

La best-sellerisation

Les éditeurs seront de plus en plus sélectifs, avec un nombre de parution en baisse dans les grandes maisons. Trop de parutions ont noyé des auteurs en mal de visibilité. Les lignes éditoriales vont se resserrer autour de choix forts.  

En 2019, le 100e exemplaire le plus vendu en France affichait 93.000 ventes, contre 98.000 pour le 100e exemplaire le plus vendu en 2020. On voit que les meilleurs livres se vendent plus. 

L'essor de l'audio

Le livre audio est plus facile à adopter que le livre numérique, car il se prête à plus de supports de lecture : smartphone, voiture, enceintes connectées, jogging ...

Contrairement au e-book, le livre audio se glisse partout, et est un média multi-tâches.

Nous croyons fortement à l'essor de l'audio et à sa prise de parts de marché importante dans la "lecture". La consommation de livres audios au Etats-Unis et au Canada en est un très bon exemple. Ces pays dictent souvent la tendance.

Les librairies de quartier doivent se réinventer

Nous aimons les libraires et travaillons beaucoup avec elles pour partager nos livres. Mais il faut se rendre à l'évidence : la courbe d'acquisition de clients d'Amazon est trop importante. Leurs processus sont parfaitement rôdés. Je suis le premier à privilégier les commerces de quartier, mais la conscience citoyenne ne suffira pas à lutter.
Les librairies doivent se spécialiser et se réinventer pour être des lieux de vie, des lieux de rayonnement culturel.

La crise sanitaire, comme toute crise, a apporté des transformations définitives. Certaines habitudes de consommation et certains modes de fonctionnement de l'industrie du livre ne changeront plus. Ce qui demeure en revanche : le livre reste un pilier de la diffusion du savoir et des expériences, et l'objet livre papier reste un indispensable au sein des foyers.

Jean Detroye, Responsable éditorial d'Anovi

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